mercredi 23 septembre 2009

Optimisme de long terme

Dans un précédent article, j'avais essayé de montrer qu’on pouvait à peu près faire dire tout ce qu’on voulait aux chiffres et aux courbes (et aux économistes…). Néanmoins, je persiste aujourd’hui en m’attardant sur un graphique qui me paraît instructif.



Nous pouvons observer que le Dow Jones a déjà connu de sévères corrections ces dernières années. La première baisse d’envergure intervient en 1998 : l’économie mondiale connaît quelques secousses (Asie, Russie) et les marchés financiers se font une première frayeur avec la faillite du fonds LTCM qui avait « légèrement » abusé des effets de levier : un pionnier qui en inspirera beaucoup d’autres.

Néanmoins, il ne s’agit que d’un accroc dans les cours. L’arrêt de la tendance haussière n’interviendra qu’au début de l’année 2000 avec un plus haut aux alentours de 11700 points.

La fin de l’illusion Internet ouvre la voie à une grande phase de consolidation, l’indice errant entre dans une zone étroite entre 10000 et 11000 points.

Certes le 11 septembre et l’affaire ENRON le feront décrocher, mais le dégonflement de la bulle n’arrivera à épuisement qu’à la fin 2002 – début 2003 (faillite de WorldCom).

La chute est de – 35 % par rapport aux plus hauts de 2000. C’est beaucoup, mais aujourd’hui cela paraît presque ridicule, tellement nous sommes blasés face aux pertes.

La situation semble alors être redevenue saine et l’indice reconstruit doucement une tendance haussière. Les leçons du passé semble avoir été intégrées, on se méfie des mouvements trop brusques… jusqu’en 2006 ! (3 ans, c’est-à-dire une éternité pour les marchés).

A partir de cette date, on observe en effet une tentative de franchissement des plus hauts de 2000. Le mouvement est d’abord modeste, puis quand les opérateurs se rendent compte que les cours tiennent, ils passent à la vitesse supérieure.

L’accélération spéculative est impressionnante pendant un an. Les cours sortent nettement du canal de consolidation esquissé depuis 1998. On se croirait revenu dix ans en arrière.

A partir de la fin 2007, la chute n’en est que plus vertigineuse. Surtout qu’un sale vocabulaire commence à se généraliser : subprime, junk bonds

On ne reviendra pas sur l’enchaînement systémique qui s’est ensuite déroulé, l’apothéose arrivant avec la faillite de Lehman Brothers. Les cours chutent de plus de 50 % par rapport, mais dans un intervalle beaucoup plus réduit que pour la précédente bulle.

Néanmoins, même si le support vers les 7600 points est allégrement crevé par un pic de baisse particulièrement acéré, la réaction de sursaut est assez rapide suite à son franchissement.

C’est le début du rebond actuel. La remontée est impressionnante et rapide : + 50 % environ par rapport aux plus bas, ce qui laisse penser que la tendance s’inverse lourdement et que le pire est dernière nous (expression très en vogue).

Il semblerait en effet rassurant que les cours rejoignent tranquillement la zone entre 10000 et 11000. Puis qu’ils amorcent une pause afin d’éviter de rejoindre des sommets spéculatifs de manière étrangement précipitée étant donné le contexte macroéconomique incertain.

C’est sans doute le scénario le plus raisonnable, quand on se focalise sur ce graphique et la tendance à long terme. Néanmoins des voix discordantes font remarquer que cette zone « rassurante » n’est toujours pas atteinte et que les cours sont encore 30 % en-dessous de leur plus haut de 2007.

Un graphique plus resserré à moyen terme montre que la tendance est plus incertaine qu’elle n’apparaissait sur le premier graphique. Même si le rebond est avéré, il semble pour l’instant s’inscrire dans une tendance toujours baissière.



L’enjeu est aujourd’hui de savoir si ce rebond est assez puissant pour « casser » cette tendance. Le premier graphique semble nous le démontrer. Cependant, de nombreux acteurs insistent sur le caractère particulièrement artificiel de la hausse actuelle, surtout due à une abondance de liquidités. Ils rappellent que beaucoup d’éléments restent incertains concernant la consommation, le crédit, l’endettement public, mais surtout l’évolution du dollar.

Il semble donc que nous soyons à un moment particulièrement crucial pour les marchés. Soit la tendance s’éclaircit avec une hausse qui se poursuit tranquillement, soit on assiste à une nouvelle cassure et la chute ne peut qu’être pire que la précédente (une nouvelle faillite retentissante venant sans doute empirer les choses).

Je préfère pour l'instant croire à l'optimisme du long terme, car le court terme est trop cruel : il nous montre juste que l'on ne sait rien.

E.B. // Moneyzine